vendredi 16 décembre 2016

Earthdawn - Introduction

Earthdawn est un jeu de rôle sur table se déroulant dans un univers médiéval fantastique. Le maître du jeu a proposé que l'un des joueurs fasse un récit du déroulement des parties, et je me suis porté volontaire. J'ai décidé de mettre l'aventure sur le blog, même si à l'heure actuelle il n'y a eu qu'une seule partie (mais ça fait déjà quelques pages de texte). Gardez à l'esprit que c'est le récit d'une partie de jeu de rôle, donc si certains éléments sont étranges, c'est normal.

Cette première partie ne correspond pas à une séance de jeu mais est l'introduction de mon personnage, un nain nommé Mûndar.


Préambule

Je te salue, lecteur. Laisse moi d'abord me présenter : je suis Mûndar, le nécromancien. Belle entrée en la matière, n'est-ce pas ? "Un nécromancien ? Quelle horreur !", dois-tu te dire en ce moment. Je ne le prends pas mal, c'est ce que pensent la plupart des gens. "Nécromancien" ne veut pas dire "être malfaisant suppôt des Horreurs", comme tu pourras t'en rendre compte si tu parviens à surmonter ce préjugé afin de lire le récit de mes aventures.


Mais commençons par le commencement. Qui suis-je, et comment suis-je devenu nécromancien, dois-tu te demander. Ce n'est effectivement pas une voie sur laquelle on pousse habituellement les jeunes enfants.
Je suis né dans une famille naine plutôt modeste. Mon père était un très bon chasseur, mais un chasseur ne roule pas sur l'or, si bon soit-il. Il parvenait néanmoins à subvenir sans problème aux besoins de notre famille, qui étaient somme toute assez restreints puisque nous n'étions que deux. Je suis enfant unique et ma mère est décédée durant mes jeunes années, tuée par une proie un peu trop hargneuse alors qu'elle accompagnait mon père à la chasse. Ca a été mon premier contact avec la mort : même si le souvenir est très flou, je me rappelle n'avoir pas vraiment compris ce que ça impliquait à l'époque.


Lorsque j’ai été en âge de l’accompagner, mon père a voulu m’apprendre les rudiments de la chasse. Il m’a offert un arc à ma taille ainsi que quelques flèches qu’il avait taillé lui-même et m’a entraîné dans les bois environnants. Il m’a montré comment utiliser un arc en me faisant tirer sur une vieille souche. Mes tirs étaient très imprécis au début ; il m’a fallu presque deux heures pour que la plupart de mes flèches ne se perdent pas dans le vide. Lorsque mon père a estimé que "ça ferait l’affaire pour l’instant", il s’est mis en quête d’une cible vivante. Au bout d’un moment, il a fini par dénicher une biche en train de s’abreuver. C’est un peu gros pour un premier gibier, mais il s’est dit, probablement à raison, que je n’arriverais jamais à toucher quelque chose d’aussi petit qu’un lapin. Je me suis donc tapi dans les buissons à ses côtés, ai encoché ma flèche et tendu la corde de mon arc avant de la relâcher.
Ma flèche est passée en sifflant un bon mètre au dessus de sa cible avant de se perdre dans les bois de l’autre côté. La biche a relevé la tête, alertée par la bruit mais, ne voyant rien, a fini par replonger la tête dans l’eau. Mon père, qui avait ravalé un juron de justesse, m’a fait signe d’encocher une nouvelle flèche et de réessayer. Je me suis exécuté, et cette fois le projectile s’est planté dans le flan de l’animal, près de son arrière-train. La biche a bondi pour s’enfuir, mais mon père parvint à lui décocher une autre flèche qui s’est fichée dans son cou. Notre proie a tout de même continué sa course avant de s’écrouler un peu plus loin. Lorsque nous nous sommes approchés, elle agitait encore faiblement ses pattes. Mon père l’a achevée avec son couteau puis m’a gratifié d’un "Pas mal, fiston". Je n’y ai pas prêté attention car j’étais concentré sur l’œil devenu vitreux de l’animal. C’était la deuxième fois que j’avais affaire à la mort, et c’est là que je me suis dit que, d’une manière ou d’une autre, on passait tous par là.


Une fois rentrés, mon père s’est occupé de dépecer la bête en disant qu’il m’apprendrait à faire ça plus tard. Le soir même nous avons mangé une partie de la biche, et ça m’a fait bizarre de manger la viande d’un animal que j’avais moi-même participé à tuer. A la fin du repas, j’ai voulu garder l’os de la biche qui était dans mon assiette, pour une raison qui me reste encore obscure. Peut-être que je voulais garder un souvenir de cette première chasse et des questions qu’elle avait soulevées en moi. J’ai emprunté un couteau à mon père et j’ai taillé grossièrement cet os pour le décorer. C’est par la suite devenu une habitude : chaque fois que j’accompagnais mon père à la chasse, je gardais un os du gibier rapporté pour le sculpter. Mon père trouvait ça un peu bizarre, mais après tout "Si ça t’amuse…".


Il n’était cependant pas le seul à trouver ça bizarre. Je jouais parfois avec les autres enfants nains de mon âge, mais je n’ai jamais été très populaire. Plutôt timide et peu bavard à l’époque, sans compter un physique peu avantageux – j’ai par exemple hérité de l’énorme nez de mon père ("C’est pour sentir le gibier !", disait-il) – j’ai toujours eu du mal à m’intégrer. Si les autres voulaient bien jouer avec moi lorsque j’étais là, ils ne cherchaient pas spécialement ma compagnie. Aussi, lorsque je voulu leur montrer quelques-unes des sculptures de ma collection pour essayer de gagner un peu de notoriété, j’en eus pour mes frais. Si un ou deux d’entre eux ont dit que c’était "assez joli", la plupart ont trouvé ça "glauque". Le résultat final a été à l’opposé de mes attentes : au lieu de rechercher d’avantage ma compagnie, ils se sont mis à la fuir.
Avec le temps, j’ai arrêté de vouloir jouer avec eux, et j’ai préféré m’isoler. Lorsque je voulais prendre l’air, j’allais dans un endroit tranquille où j’étais sûr de ne pas les croiser : le cimetière. Les morts ont beau être nombreux, ils ont l’avantage d’être très peu moqueurs, et je préférais leur compagnie à celle des vivants. Bien sûr, les autres enfants ont fini par l’apprendre, et même s’ils ne venaient pas me déranger dans mon sanctuaire, cela n’a pas amélioré ma réputation auprès d’eux. Ils se sont mis à me railler de loin, et un beau jour l’un d’entre eux m’a qualifié de "nécromancien" pour se moquer. Ce n’était qu’une plaisanterie irréfléchie de sa part, mais elle a été reprise par les autres et c’en est devenu mon surnom ; un surnom qui a perduré pendant les années qui ont suivies.
Si, au début, je me suis insurgé contre ce sobriquet, j’ai fini par ne plus y prêter attention. Mais à mesure que le temps passait et que j’entendais ce surnom sur de plus en plus de lèvres, il a fini par devenir une idée et, de là, une envie. "Tout le monde m’appelle nécromancien ? Hé bien, dans le fond, pourquoi pas ?". Pourquoi pas, en effet ? Je n’aimais pas la chasse, et malgré tous les efforts de mon père pour m’enseigner son métier, je n’ai jamais été très doué. Si je sais aujourd’hui encore reconnaître les traces de certains animaux, je suis toujours infichu de suivre convenablement une piste à moins que l’animal ne laisse des traces bien visibles dans la boue d’un chemin bien dégagé. Ne parlons pas de ma précision au tir à l’arc qui ne s’est guère améliorée (mon père avait raison, je n’ai jamais pu toucher un lapin). Devenir un mage nécromant était une idée qui me séduisait de plus en plus : cela me semblait plus intéressant que de passer ma vie à traquer des bestioles dans les bois, et peut-être que ça me permettrait de mieux comprendre ce qu’est la mort. Je savais que les nécromanciens sont généralement mal vus, mais je me disais que ça ne changerait pas grand-chose à ma situation de ce point de vue là. De plus, je devais pour cela quitter ma ville natale, ce qui n’était pas non plus pour me déplaire.


J’ai donc fini par quitter la maison familiale pour me lancer à la recherche d’un maître pouvant m’enseigner son art. Mon père était farouchement opposé à cette idée, c’est pourquoi mon départ s’est fait avec mon sac sur le dos en claquant la porte.
Il m’a fallu plusieurs mois pour trouver quelqu’un apte à m’enseigner les arts de la nécromancie. J’ai fini par entendre parler, dans une auberge, d’un nécromancien qui serait passé par là peu avant. J’ai essayé de glaner des informations à son sujet, récoltant beaucoup d’histoires sombres et morbides que j’ai décidé d’ignorer, les mettant sur le dos de l’antipathie générale que suscite ce genre de mage. J’ai tout de même réussi à obtenir son nom : Dalendal Sonnecor.
Je me suis mis à suivre sa piste, heureusement assez nette puisque les gens parlaient de lui partout où il passait. J’ai fini par le rejoindre au bout de quelques semaines au beau milieu de la route entre deux villages. S’il a d’abord cru que je me moquais de lui en disant que je voulais qu’il m’enseigne son art, mon insistance a eu raison de ses doutes et il a fini par accepter avec un certain enthousiaste puisqu’il n’avait jamais eu d’apprenti et que cela lui semblait être une expérience intéressante.


C’est ainsi que j’ai commencé à m’engager sur la voie de la nécromancie. Les débuts ont été laborieux puisque Dalendal devait apprendre à devenir un maître en même temps que j’apprenais à devenir un mage, mais ça s’est ensuite arrangé à mesure que nous progressions tous les deux. Dalendal était un humain d’un âge assez avancé, un grand bonhomme très mince avec des cheveux courts et grisonnants. Pour ma part, je ne suis pas très grand – même pour un nain – si bien que je lui arrivais à peine au nombril. J’étais en revanche deux fois plus large que lui, ayant hérité des larges épaules de mon père (en plus de son nez). Mon maître était toujours très bien rasé, tandis que j’avais développé une barbe touffue et très noire pourvue d’une tresse en son centre dans laquelle j’avais accroché un petit os sculpté. J’avais ajouté cet ornement un beau jour par amusement pour assumer mon surnom de nécromancien, et je ne l’ai finalement jamais retiré. Enfin, si j’avais un physique peu gracieux, lui en revanche avait dû être un séducteur dans ses jeunes années – à se demander comment il en était venu à pratiquer la nécromancie, ce qui ne doit certainement pas aider à séduire ces dames. Je me suis posé plusieurs fois la question, mais je ne l’ai jamais abordée avec lui.


Deux années se sont donc écoulées, Dalendal finissant par devenir un assez bon maître en plus d’être un compagnon de voyage agréable. Il m’a offert un vieux grimoire qu’il avait en sa possession pour que j’y note mes incantations. Le livre n’était manifestement plus de la première jeunesse, en témoignait sa couverture plus qu’usée, mais il m’a dit que "ça ferait l’affaire pour l’instant". Cette phrase était décidément une constante chez les personnes voulant m’enseigner leur savoir. Le grimoire m’a cependant été bien utile pour mon apprentissage, ayant conservé quelques propriétés magiques malgré son état d’usure.
Ainsi donc suis-je devenu un nécromancien. Dalendal connaissait essentiellement des sorts permettant de manipuler les os et les corps, disant que les esprits étaient "trop pénibles". J’aurais aimé explorer également cette voie de la nécromancie, mais j’étais trop content d’avoir réussi à trouver un maître pour m’en plaindre. En retour, Dalendal s’était montré admiratif de mon travail de sculpture sur les os et m’a demandé de lui montrer comment faire, ce que j’ai fait avec plaisir.


Un beau jour, Dalendal m’a annoncé que nous devions nous quitter. Il a été très vague sur la raison de cette séparation, mais de ce que j’ai compris il avait quelque chose d’important et d’urgent à faire, et qu’il tenait absolument à le faire seul. De toutes façons, m’a-t-il assuré, il n’avait quasiment plus rien à m’apprendre et si je voulais progresser d’avantage, il fallait que je me débrouille par moi-même ou que je trouve quelqu’un d’autre de plus versé dans les arts nécromantiques que lui. Il m’a tout de même laissé une ou deux pages arrachées à son propre grimoire sur lesquelles il a noté les quelques sorts qu’il n’avait pas eu le temps de m’enseigner pour que je puisse les apprendre plus tard, puis m’a quitté non sans une certaine émotion après m’avoir assuré qu’il était ravi d’avoir eu un apprenti.
Je me suis donc retrouvé seul pour la première fois depuis deux ans, ce qui m’a fait bizarre sur le moment. J’ai tout de même repris ma route sans but précis, me disant que je verrais bien où mes pas m’amèneraient.


C’est ainsi que j’ai commencé à me forger une petite réputation. Les nécromanciens ont beau être mal vus, on peut toujours trouver des gens désirant faire appel à nos services. J’ai donc erré de-ci de-là, offrant mon art à ceux qui le réclamaient.


J’en suis presque à la fin de cette présentation de ma personne ; il me reste un dernier détail à vous relater.
Un beau jour, alors que je marchais le long d’une route mal entretenue, un rugissement a résonné dans les collines boisées autour de moi. Intrigué, j’ai cherché l’origine de ce cri. Au bout de deux heures, j’ai fini par trouver le cadavre d’une créature énorme récemment décédée. Je ne saurais vous dire à quelle espèce elle appartenait : elle était très grande – trois ou quatre fois plus haute que moi – et sa peau était recouverte d’un épais cuir avec des écailles bleutées. Son corps présentait plusieurs blessures impressionnantes, et il avait été en partie déchiqueté, un peu comme si une autre énorme bête avait arraché des morceaux de viande pour se nourrir (peut-être l’un de ses congénères?).
En contemplant le cuir écailleux de la créature, il me vint une idée. Mon vieux grimoire s’abîmait de plus en plus et sa couverture risquait de bientôt se détacher. Avant de partir, Dalendal m’avait dit que je ferais mieux de me trouver un nouveau grimoire ou de faire restaurer celui-ci, car il risquait de perdre toute sa magie s’il venait à trop se détériorer. Trouvant les écailles bleutées magnifiques et sentant une faible magie résiduelle dans le corps du monstre, je me suis dit que son cuir serait parfait pour recouvrir mon grimoire. Faisant appel à mes souvenirs de l’enseignement de mon père sur la manière de dépecer une bête, je me suis mis au travail. Cela n’a pas été sans mal, n’ayant jamais excellé dans le domaine, manquant de pratique, et n’ayant jamais travaillé sur une créature aussi imposante. Il m’a fallu un bon moment avant de réussir à récupérer un morceau de cuir en bon état assez gros pour recouvrir mon grimoire. Ma tâche terminée, j’ai contemplé une nouvelle fois le corps de la bête et ai pensé à mon habitude de tailler les os, et je me suis dit que je ne pouvais pas repartir sans avoir un os de cette créature. Mon choix s’est porté sur celui de sa patte avant qui était déjà en partie dénudé à un suite à un coup de griffe. Ainsi donc suis-je reparti avec un bon morceau de cuir et un os aussi long que mon bras.
Le soir même, contemplant ce dernier trophée à la lueur du feu et me demandant de quelle manière j’allais le tailler, je me suis souvenu d’une autre chose que m’avait enseigné Dalendal. En plus du grimoire, m’avait-il dit, il y a deux objets qu’un nécromancien digne de ce nom utilise : un focalisateur magique pour renforcer et faciliter ses incantations, et une bonne lame acérée "parce qu’on sait jamais, ça peut toujours être utile lorsqu’on a pas le temps d’incanter un sort". Lui même utilisait un bâton d’un bois particulier (dont je n’ai pas retenu le nom) et dissimulait une dague d’acier sous ses vêtements. Je sais qu’il s’en est servi plusieurs fois pour se défendre contre des détrousseurs qui voyaient en lui une proie isolée et facile et ont été surpris à la fois par sa dague et ses sorts, mais aussi par le vieux plastron de cuir qu’il portait sous sa chemise (habitude qu’il m’a également transmise).
Pour ma part, n’ayant encore ni l’un ni l’autre de ces objets, je me suis dit "pourquoi ne pas faire les deux en un ?". J’ai donc entrepris de tailler l’os pour en faire une lame. Je pensais tout d’abord faire une dague, mais au vu des dimensions de ma matière première, cela s’est transformé en glaive. Il m’a fallu longtemps pour le sculpter : l’os était étonnamment résistant, peut-être grâce à la faible magie résiduelle qu’il abritait. Lorsque j’ai réussi à obtenir une lame satisfaisante, j’y ai gravé des runes que j’avais apprises au cours de ma formation afin de la transformer en focalisateur pour ma magie nécromantique.
Concernant le grimoire, je n’avais pas les compétences pour refaire moi-même la couverture (les leçons de broderie que j’avais reçues n’étant pas suffisantes), je l’ai donc apporté à un professionnel dans la première ville que j’ai croisée. J’en ai profité pour chercher un maître d’arme pouvant m’enseigner les rudiments de maniement de l’épée. Je n’ai appris que les leçons de base et ne serait jamais un grand escrimeur, mais je ne comptais de toutes façons pas m’en servir souvent – c’était surtout pour ne pas me blesser moi-même le jour où j’aurais besoin de me défendre par ce biais.


C’est ainsi que je suis entré en possession de mes deux objets fétiches : mon grimoire, que j’ai baptisé Glacécaille (le cuir récupéré sur la créature étant devenu très froid au toucher depuis qu’il a été appliqué sur le grimoire, pour une raison que j’ignore encore), et mon glaive nommé Grifferune, puisque l’os dont il est issu a été initialement révélé par un coup de patte dotée d’énormes griffes (et la créature sur lequel je l’ai prélevé possédait elle-même des griffes impressionnantes). Certes, ces deux noms font un peu "artefacts maudits qu’on trouve dans les histoires", mais après tout, je suis un nécromancien, non ?


Laisse moi maintenant te conter l'une de mes aventures. Ce n'est pas la première que j'aie vécu, mais c'est certainement la première qui vaille la peine d'être couchée sur le papier.


2 commentaires:

  1. Super début ! Bravo !
    Tu t'es inspiré d'histoire pour écrire la tienne ? Choisir un nécroman, c'est pas si courant !

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    1. Merci :) Il faudra que je pense à mettre la suite d'ailleurs (enfin, le début de l'aventure, pour être précis).

      Non je ne me suis pas inspiré de quoi que ce soit, du moins pas consciemment.

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