mercredi 27 mars 2019

Pathfinder Kingmaker

Si vous pratiquez le jeu de rôle papier, vous connaissez peut-être le jeu Pathfinder, qui utilise un système dérivé et très proche de celui de Donjons et dragons. Pathfinder Kingmaker est un jeu vidéo sorti en septembre 2018 qui se base sur le jeu de rôle papier et que j'avais très envie de tester, étant moi-même MJ à Pathfinder. Du coup, qu'est-ce que ça donne ?


Pour commencer, parlons de la fidélité par rapport au système de Pathfinder. Globalement, ça suit assez bien ce dernier au niveau des règles, donc les habitués du JDR papier s'y retrouveront assez facilement. Pour ceux qui ne connaissent pas du tout le système (ni celui de Donjons et dragon), ça risque d'être un peu plus compliqué. Le système de Pathfinder n'est pas le plus simple qui soit, et vous risquez d'être un peu perdu au milieu de toutes les statistiques et tous les termes propres au système. La création de personnage risque également de vous prendre du temps, vu qu'il vous faudra lire les différentes capacités de chaque classe, les dons, les sorts, etc... (sans compter que vous ne saisirez pas forcément bien leur portée) là où les habitués sauront déjà à peu près quoi choisir. Pour palier à cela, les développeurs ont intégré la possibilité de laisser le jeu gérer la création et l'évolution du personnage selon un archétype pré-déterminé. À vous de voir si ça vous convient ou si, comme moi, vous préférez créer votre personnage comme vous le souhaitez. N'ayant pas testé la fonctionnalité, je ne peux pas vous dire ce que valent ces personnages pré-définis.

À noter tout de même que quelques éléments ont été simplifiés par rapport au système d'origine. Par exemple, il y a beaucoup moins de compétences disponibles, et la liste de sorts est également beaucoup plus réduite (ce qui n'est pas très étonnant étant donné la liste énorme que possède le jeu d'origine). Il n'intègre pas non plus toutes les races ni toutes les classes (globalement, il s'agit des races et classes de base, avec quelques unes en plus, comme le magus ou l'alchimiste). Ces simplifications sont parfaitement compréhensibles dans le cadre d'un jeu-vidéo, et ce n'est absolument pas dérangeant.

Concernant l'univers, il s'agit de Golarion, le monde proposé par les créateurs de Pathfinder. Pour le coup, je ne connais pas du tout l'univers de base (j'utilise mon propre univers de jeu lors de mes parties), donc je ne peux pas dire s'il est retranscrit fidèlement ou non (mais je ne vois pas pourquoi il ne le serait pas).

Venons en au jeu lui-même. Vous avez déjà joué à Baldur's Gate (ou au moins vu à quoi ça ressemblait) ? Ben c'est pareil. Vous dirigez un groupe composé de 1 à 6 aventuriers que vous pouvez déplacer dans un environnement vu de 3/4 haut. Vous pouvez les faire interagir avec divers éléments de décor, parler à des gens, et lors des combats (qui se déroulent en temps réel) vous pouvez mettre le jeu en pause le temps de donner des instructions à chaque personnage.

Les combats sont bien sûr un élément central du jeu, le système Pathfinder étant très orienté sur cet aspect. Je n'ai pas grand chose à dire là-dessus : ça fonctionne bien, et la difficulté est assez bien dosée, sauf pour quelques combats que j'ai trouvés affreusement mal équilibrés. Au passage, la difficulté est entièrement paramétrable et peut être ajustée à tout moment, donc n'ayez pas peur de vous retrouver bloqué par un ennemi insurmontable (et si vous êtes du genre à aimer vous casser les dents, c'est possible aussi).

Je ne vais pas m'étendre plus que ça sur le fonctionnement global du jeu, je pense que la plupart d'entre vous connaissent Baldur's Gate ou un de ses dérivés. Je vais m'attarder un tout petit peu plus sur deux spécificités un peu moins courantes.

La première et l'ajout de certains passages "narratifs". Lorsque vous entrerez dans certaines zones, au lieu d'afficher la carte habituelle avec vos personnages, vous aurez à la place un texte décrivant une situation et plusieurs choix proposés, un peu comme dans les "livres dont vous êtes le héros". Certains de ces choix feront appel aux compétences de vos personnages, et il peut y avoir plusieurs moyens de résoudre la situation (ainsi que plusieurs résolutions possibles). Ce n'est pas un élément exclusif à Pathfinder Kingmaker, mais on ne voit pas forcément ça dans tous les jeux du genre, c'est pour cela que je le mentionne. Pour ma part, je trouve ça assez bienvenu, ça permet de narrer des situations qui seraient difficiles à retranscrire autrement (ou alors via une bête cinématique sur laquelle on aurait aucune emprise).

La seconde spécificité (qui, pour le coup, est vraiment propre au jeu) est la gestion de votre royaume. En effet, vous vous retrouverez à la tête d'une baronnie au bout de seulement quelques heures de jeu. Vous pourrez la développer en construisant des bâtiments dans votre capitale ainsi que dans les quelques bourgades disséminées dans les régions que vous contrôlez, vous devrez gérer les problèmes qui ne manqueront pas de surgir et vous pourrez étendre votre territoire au fur et à mesure du jeu.

Ce côté gestion ajouté était l'une des choses qui me donnaient envie d'acheter ce jeu : j'aime les JDR et j'aime les jeux de gestion, donc un jeu qui fait les deux à la fois, c'était tentant. Mais autant le côté jeu de rôle fonctionne bien, autant le côté gestion est plus critiquable. 

Tout d'abord, il n'est quand même pas folichon. Il se résume à deux choses : construire des bâtiments dans les villes/villages, et gérer les problèmes. Je vais passer rapidement sur le premier point, car cela ne sert qu'à augmenter les statistiques de votre baronnie. Ça ne change rien au visuel de la ville lorsque vous vous y trouvez et n'apporte rien de spécial en dehors de ces quelques points de statistique.

Concernant la gestion des problèmes, elle se résume à affecter l'un de vos conseillers à la tâche pour qu'il s'en charge en arrière plan. C'est tout. Ce n'est pas très intéressant, mais en plus c'est assez mal dosé. Tout d'abord, passé la moitié du jeu, vous vous retrouvez avec des problèmes trop difficiles. En effet, chacun de vos conseillers a une caractéristique pour la résolution des problèmes qui augmente avec le temps, au fur et à mesure de ses succès. Sauf que certains conseillers se recrutent sur le tard et commencent avec une caractéristique faible alors que la difficulté des missions à leur confier est déjà élevée. Du coup vous avez le choix entre confier la résolution à un autre conseiller (mais dans ce cas le nouveau ne s'améliore pas) ou bien la confier au nouveau, en sachant qu'il y a de grandes chances qu'il échoue, ce qui l'empêche de progresser, et peut même résulter en une perte de statistiques pour votre royaume. S'instaure alors un cercle vicieux dans lequel vos bons conseillers (ceux que vous recrutez le plus tôt) continuent de s'améliorer, tandis que les mauvais (qui sont arrivés plus tard) sont condamnés à échouer sans arrêt et donc à stagner, voire à plomber vos statistiques. Du coup vos citoyens sont mécontents, ce qui réduit encore l'efficacité de vos conseillers, et vous ne vous en sortez plus. J'avais beau faire du mieux que je pouvais et passer tout de même un temps non négligeable sur l'écran de gestion du royaume, j'ai passé la moitié du temps avec des citoyens au bord de l'émeute parce que je me voyais obligé d'assigner à mes conseillers des missions qu'ils n'avaient aucune chance de réussir. D'ailleurs, si la satisfaction des citoyens baisse assez vite, je n'ai jamais réussi à la faire remonter autrement qu'en organisant de grandes fêtes très coûteuses, même en enchaînant plusieurs résolutions de crises fructueuses.

Une autre chose assez mal dosée est le nombre de tâches pouvant être assignées. En parallèle des problèmes à gérer, vous pouvez lancer vos conseillers dans des projets qui vont les occuper pendant une longue période. Ces projets peuvent apporter des bonus passifs (comme une augmentation des revenus), mais certains ne sont pas du tout clairs quant à leur apport réel. Le soucis principal étant que, au vu du nombre de problèmes qu'il faut gérer si on ne veut pas voir ses statistiques baisser, il est très difficile de se priver d'un conseiller (surtout un des meilleurs) pendant plusieurs semaines pour qu'il mène à bien l'un de ces projets. Du coup, ils se retrouvent à s'accumuler sans que vous puissiez vous en occuper (sous peine de ne plus pouvoir gérer certaines crises, car chacune ne peut être résolue que par 2 ou 3 conseillers spécifiques).

Au final, ce côté gestion, bien qu'il occupe pas mal de temps, n'est pas très intéressant (on se contente d'assigner les tâches à quelqu'un), n'apporte quasiment rien pour la partie JDR (qui reste le cœur du jeu) et est en plus assez frustrante pour les points que je viens de soulever. Notez d'ailleurs que, un peu comme la gestion automatique de l'évolution des personnages, le jeu propose d'automatiser aussi la gestion de votre royaume pour vous éviter une fin de partie prématurée en cas de révolte du peuple.

Bref, la partie gestion ne m'a vraiment pas convaincu. Heureusement, la partie JDR est plutôt réussie, même si elle souffre elle aussi de quelques défauts. L'un d'entre eux est un problème de rythme. En effet, vous vous retrouvez parfois avec rien de spécial à faire (toutes les quêtes que vous avez sont en attente de nouveaux événements) et vous déambulez sur la carte en essayant de trouver de quoi vous occuper, et d'autres fois vous allez avoir 4 ou 5 quêtes "urgentes" qui vont débouler en même temps. J'aurais préféré que les grosses quêtes soient un peu mieux réparties tout au long du jeu, plutôt que d'avoir cette progression en dents de scie.

Un autre point que je n'ai pas trop apprécié est que plusieurs quêtes sont liées à l'un des compagnons de route que vous allez recruter au fil du jeu (une suite de quête pour chacun d'eux, en fait). Comme cela représente tout de même une part importante des quêtes du jeu, on a envie de les faire, mais cela nous force à jouer avec des personnages que l'on apprécie pas forcément. Pour ma part, j'aime bien avoir ma petite équipe que j'ai moi-même composée, du coup quand on me force à jouer un personnage (que je trouve mauvais souvent, en plus), ça a tendance à me gonfler (surtout quand il faut lui faire passer les 5-6 niveaux qu'il a de retard, histoire qu'il ne soit pas trop un boulet).

Pour finir, je n'ai pas l'habitude de parler des jeux d'un point de vue technique, mais là il y a quand même une chose que je veux souligner : les temps de chargement affreusement longs. À la longue c'est franchement pénible de passer des dizaines de secondes sur chaque écran de chargement, tout ça pour simplement entrer dans une salle d'auberge dans laquelle on ne va pas s'attarder. Rien que quitter ou rejoindre l'écran de gestion de votre royaume nécessite un chargement assez long, et c'est franchement pénible car on s'y rend assez souvent (lorsqu'on ne met pas le pilotage automatique). C'est rare que je peste après les temps de chargement, mais là c'est vraiment pénible.


Au final, est-ce qu'il vaut le coup, ce jeu ? Oui, tout de même. L'aventure est globalement plutôt bonne, et la plupart des choses que j'ai à reprocher portent surtout sur l'aspect gestion de royaume, qui est un élément secondaire et optionnel. C'est juste dommage que cet aspect du jeu ne soit pas très réussi, car c'est tout de même une fonctionnalité qui est mise en avant et qui peut occuper pas mal de temps si on décide de l'assumer. L'aventure est agréable et assez longue (ma partie fait environ 70h, et je ne suis pas allé totalement au bout, même si j'en suis certainement pas très loin), mais il faudra accepter de souffrir de temps de chargement interminables, de certains moments du jeu un peu creux et d'autres qui donnent l'impression d'être trop chargés. Si vous aimez les jeux "à la Baldur's Gate", Pathfinder Kingmaker n'est pas un mauvais choix bien qu'il reste perfectible.


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