On ne sait jamais trop sur quoi on va tomber quand on achète un livre de 600 et quelques pages. Parfois le récit est très bon, des fois il est très décevant, et des fois on nous trompe sur la marchandise.
Voila. Hé bien ce résumé, moi j'appelle ça de la publicité mensongère, car ça n'est absolument pas la préoccupation principale du bouquin. Ce récit qui nous est vendu ne s'étale que sur un quart, un tiers grand max des quasi 700 pages, le reste c'est juste du remplissage.
Le récit est entièrement à la première personne, mais le point de vue alterne entre celui des deux protagonistes, à savoir Riham et Estæbann (allez savoir pourquoi, mais la plupart des noms propres dans ce bouquin sont écrits de façon inutilement compliquée, peut-être pour faire plus «fantaisiste»...). Et puisqu'on est dans la tête des personnages, l'autrice en profite pour nous faire partager leurs pensées. Et leur pensée (au singulier, oui), c'est qu'ils sont amoureux. Oulala, ils sont amoureux. Vous allez le comprendre très vite ça, qu'ils sont amoureux, parce que c'est répété inlassablement pendant environ 400 pages, qu'ils sont amoureux. À force de vous répéter encore et encore qu'ils sont amoureux, vous allez bien le savoir qu'ils sont amoureux, les amoureux.
Si les 2-3 premiers chapitres du bouquins peuvent laisser penser qu'on va avoir droit à une histoire en plus de l'expression des sentiments des personnages, cette illusion se dissipe rapidement pour laisser ensuite place à un bloc d'environ 400 pages bien tassées où il ne se passe absolument rien. Mais vraiment hein, il ne se passe rien. Les très rares et minces «péripéties» (notez bien les guillemets, j'insiste) n'ont absolument aucun rapport ni aucun impact sur l'histoire la plupart du temps, et lorsque ça a un vague rapport ça ne fait quasiment pas avancer les choses. Il faut attendre le dernier quart du livre pour que l'autrice se rappelle qu'à un moment il faudrait quand même raconter des choses, et alors on a droit à un sprint final qui raconte d'un coup tout ce que le récit avait à offrir, enchaînant révélations sur révélations (la moitié d'entre elles au moins ne sont même pas surprenantes, ça se voyait venir depuis les premières pages, genre «Keuâh ! Le mec qui a l'air méchant depuis le début est en fait un méchant ? Ohbençaalorsdisdoncjel'avaisvraimentpasvuvenirjesuistoutsurprisholala»), et pouf, c'est fini.
Mais alors, me demanderez-vous, si toute l'histoire se trouve dans les 25 derniers pourcents du livre, qu'est-ce qu'il y a dans le reste ? Je vous l'ai dit : ils sont amoureux ! Les deux tiers du livre sont remplis par les pensées des personnages, et les personnages ne pensent qu'à une seule chose : ils sont amoureux l'un de l'autre. C'est répété encore et encore de toutes les façons possibles, au point que ça en devient franchement ridicule. J'ai passé une bonne partie du livre à lire les pages en diagonale parce que j'en avais marre qu'on me le répète constamment. C'est bon, au bout du 3ième chapitre passé à lire la même chose, j'ai bien compris qu'ils sont amoureux, merci bien ! Ou plutôt, j'ai bien compris qu'ils avaient très envie de baiser et qu'ils sont frustrés de pas pouvoir le faire.
Parce qu'en vérité, «l'histoire d'amour» (là aussi j'ai mis des guillemets, vous avez vu ?) se résume à une seule chose : ils se trouvent mutuellement très beaux et attirants et ils ont très envie de niquer, mais ils peuvent pas parce que si Riham touche quelqu'un, cette personne meurt, alors ils sont obligés de porter des vêtements et des gants pour se toucher et ne peuvent même pas se faire de bisou. Voila, c'est uniquement ça, «l'histoire d'amour» qui occupe la plus grande partie du livre. La seule chose qui nous permet de comprendre que les personnages sont amoureux c'est qu'ils ne cessent de nous le répéter, parce que franchement moi je n'ai jamais compris ce qui les attirait l'un vers l'autre (à part l'envie de baiser, ça c'est très très clair). Le truc, c'est qu'on ne voit pas leur amour naître, ils sont déjà amoureux dès le début du livre, et pendant plusieurs chapitres au début ils ont plutôt l'air de se détester. C'est vraiment super bizarre leur histoire, et honnêtement je n'ai jamais réussi à prendre leurs sentiments au sérieux tellement ils me paraissaient peu crédibles. Le seul truc tangible, c'est leur envie de niquer et leur frustration de ne pas pouvoir le faire...
Enfin plus ou moins. Parce que (et là attention, je vais révéler un truc qu'on apprend au milieu de l'histoire... enfin, au milieu du livre quoi, pendant le bloc chiant qui sert à rien), on finit par apprendre que Riham peut tuer Estæbann si elle le touche... mais que ça prendrait plusieurs heures pour cela. SÉRIEUSEMENT ?! PLUSIEURS HEURES ?! Mais pourquoi vous me cassez les couilles avec votre désir refoulé depuis 300 pages ? Pourquoi prendre toutes ces précautions depuis le début ? S'il faut vous toucher pendant plusieurs heures pour qu'il meurt, vous pouvez bien le faire pendant 10 minutes le temps de tirer un coup, alors faites le et comme ça on pourra passer au vrai récit ! Et c'est globalement ce qu'il se passe, ils vont enfin niquer à ce moment là, et quelques chapitres plus loin (ouais, ils faut quand même bien qu'ils aient le temps de nous dire en détail à quel point ils sont toujours encore plus amoureux maintenant qu'ils ont baisé) on démarre enfin le vrai récit.
C'est vraiment de la fumisterie. Déjà que le récit vendu par le résumé n'occupe qu'une petite partie du livre, mais en plus l'énorme pavé de remplissage lourdingue ne sert à rien puisqu'on finit par apprendre qu'en fait ça va, y'a pas de problème finalement. Ah ben super, j'ai pas du tout l'impression qu'on s'est foutu de ma gueule et qu'on m'a fait perdre mon temps.
Et accessoirement, outre le fait que leur frustration sexuelle répétée ad nauseam pendant 300 pages n'a au final pas de raison d'être, le fait qu'elle mette autant de temps à tuer quelqu'un par contact réduit énormément le seul et unique intérêt de Riham : son pouvoir. C'est quoi ce pouvoir de merde ? On nous répète tout le long du bouquin qu'elle est maudite, qu'elle est mortelle, mais ça aussi c'est de la fumisterie. Parce que certes, si elle peut tuer c'est principalement avec sa voix (si elle crie, ça tue les gens), sauf que... ben ça ne sert jamais à rien dans le récit. À aucun moment elle ne se sert de sa voix pour tuer qui que ce soit ni faire quoi que ce soit. Je suis désolé de spoiler là encore, mais c'est vraiment pour vous faire comprendre à quel point ce qui est vendu par le résumé n'est que de la poudre aux yeux.
Je pense que l'autrice a gravement surestimé sa capacité à exploiter son idée de base. Car l'idée du récit n'est pas mauvaise hein, y'avait moyen de faire un truc intéressant avec ça, sauf qu'elle n'a rien trouvé pour l'enrichir mais comme vendre un bouquin de fantaisie de seulement 150 pages ça le fait moyennement, elle l'a gonflé comme un ballon de baudruche en le remplissant de vide qu'elle fait passer pour une histoire d'amour alors qu'en fait c'est juste deux jeunes adultes qui on envie de niquer. C'est ça au final, ce bouquin, un gros ballon plein de vent avec des bites et des nichons dessinés dessus pour détourner l'attention.
Pour finir, je dirais que si je n'ai jamais compris ce qui faisait que les deux personnages étaient amoureux (en dehors du désir sexuel, toujours), je n'ai jamais compris leurs motivations dans le récit non plus. Par exemple, on nous dit que Estæbann veut utiliser Riham pour se venger, et veut la trahir et la tuer pour se venger d'elle aussi. Mais pourquoi ? Qu'est-ce qu'elle t'a fait ? Je n'ai jamais pigé ce que Estæbann reprochait à Riham, ça n'est jamais vraiment expliqué, ou si ça l'est alors c'est tellement capillotracté que je n'ai rien compris. Et pour ce qui est de te venger du prince qui t'a emprisonné (ouais je divulgâche, comme on dit à l'académie française, mais franchement c'est pas bien grave), mec, t'as butté son fiancé et ça l'a rendu un peu chafouin, c'est compréhensible il me semble ? Ça c'est pour Estæbann, mais pour Riham c'est encore pire, car sa seule motivation c'est... de suivre Estæbann parce qu'elle est trop amoureuse de lui, quoi, tu vois ? Parce qu'elle a beau dire qu'elle doit sauver le royaume en renversant la monarchie et tout ça, en vérité c'est surtout l'objectif que lui soufflent ceux qui veulent la manipuler, mais elle-même n'a jamais l'air vraiment concernée par tout ça. Tout du long, la seule chose qui la fait avancer, c'est d'être avec son chéri et c'est tout. Et comme leur «histoire d'amour» est inintéressante au possible, ben... on s'en fout.
Au final, ce livre c'est une bonne idée de départ mais dont l'autrice ne savait manifestement pas quoi faire, alors elle l'a étalée autant que possible en comblant les énormes trous avec une «histoire d'amour» qui se résume à un désir sexuel refoulé (sans raison, en plus) qu'elle nous martèle encore et encore jusqu'à ce que ça en devienne risible. Le problème, c'est que ce remplissage dure tellement longtemps que, lorsqu'on arrive enfin à la partie intéressante du récit, on en a plus rien à foutre. J'étais tellement soûlé par le vide abyssal des 400 premières pages que tout ce qui arrive aux personnages à la fin m'a laissé de marbre (d'autant plus que c'est vite expédié). Répéter en boucle que deux personnages ont envie de baiser ne suffit pas à les rendre attachants. Bref, si vous voulez malgré tout lire Les larmes de la mort, voici mon conseil : lisez les premiers chapitres, puis, dès que vous sentez que ça part sur les monologues intérieurs des personnages pour répéter qu'ils sont très amoureux, sautez directement au dernier quart du bouquin, vous ne raterez pas grand chose d'essentiel à la compréhension.

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