samedi 15 novembre 2025

La série Acotar

On a l’habitude dans les sagas cinématographiques d’avoir l’épisode de trop, celui dont on se serait bien passés parce qu’il ruine la saga, celui dont on se dit que les producteurs l’ont fait dans le seul but de gratter du pognon sur le dos de la licence alors qu’ils n’avaient aucune idée de quoi mettre dans le film. Hé bien manifestement ce concept s’applique aussi pour les sagas littéraires.

La série quoi ?

La série Acotar est une pentalogie écrite par Sarah J. Maas, et déjà j’ai quelques trucs à dire avant même d’aborder le contenu des bouquins. D’abord, c’est quoi ce nom de saga ? Je n’ai aucune idée de ce qu’est ou signifie Acotar, car ce mot n’est mentionné nul part dans la saga (j’ai découvert le nom de la série en regardant wikipédia juste avant d’écrire cet article). Si le nom de la saga n’est pas évocateur, le titre des livres non plus puisqu’ils se nomment tous «Un palais de X et de Y», où X et Y sont deux mots choisis plus ou moins au hasard dans le dictionnaire ; difficile de savoir quel titre correspond à quel tome, on pourrait les interchanger sans qu’on remarque la différence. Enfin, plutôt qu’une pentalogie (5 tomes donc, pour ceux qui ne suivent pas), je pense qu’il vaut mieux considérer cette saga comme une trilogie accompagnée de deux spin-off tout pourris (vous voyez la première trilogie Star wars avec son fameux épisode «Holiday special» ? Hé ben tout pareil).

Un bon départ 

La saga raconte les aventures de Feyre, une jeune femme issue d’une famille aisée qui s’est retrouvée complètement ruinée, au point qu’elle doit maintenant chasser afin de nourrir ses deux sœurs et son père handicapé. Au cours d’une de ces chasses, elle tue un immortel, une de ces créatures légendaires qui hantent les histoires. Peu de temps après, un autre immortel déboule dans la cabane de la famille et exige que Feyre la suive jusqu’au royaume de Prythian, le royaume des immortels, pour la punir de son crime. Feyre va donc se retrouver plongée dans un monde rempli de créatures de légendes et être mêlée aux problèmes des immortels de Prythian.

Sincèrement, le récit est beaucoup plus prenant que ce à quoi je m’attendais. Ça reste de la fantaisie assez légère (si vous êtes adeptes de trucs plus sombres, passez votre chemin) mais l’histoire est sympathique et avance bien, on ne s’ennuie pas. Les livres sont ni trop courts ni trop longs, les événements s’enchaînent sans avoir de passages mous et les personnages sont sympathiques (sauf une, Nesta, mais elle est assez en retrait donc c’est pas très gênant... pour le moment...). Le récit est intégralement raconté à la première personne du point de vue de Feyre, un procédé que j’aime assez bien puisque ça évite de se disperser avec des personnages dans tous les sens et ça aide beaucoup à s’attacher au personnage (du moins quand celui-ci est appréciable).

Par contre, je vais finir par croire que les autrices de fantaisie sont incapables d’écrire un bouquin sans mettre une histoire d’amour au milieu. Ceci dit, contrairement aux Larmes de la mort de ma dernière critique, l’histoire d’amour n’est ici qu’en toile de fond ; le véritable récit porte sur un conflit entre des peuples d’immortels. Bref l’histoire d’amour ne prend pas toute la place (et est plus intéressante que celle des Larmes de la mort qui était vraiment le niveau 0 de la romance) donc elle ne me dérange pas et se marie au final plutôt bien avec le reste.

Le seul véritable reproche que j’ai à faire à la saga est que certaines ficelles scénaristiques sont un peu grosses (c’est des cordes scénaristiques, quoi) et que les choses semblent parfois un peu trop faciles et passent rapidement. L’avantage de ce dernier point est que, comme je l’ai dit, le récit avance bien et qu’on a jamais un passage qui traîne inutilement en longueur. Vraiment, j’ai lu les livres beaucoup plus vite que je ne pensais (et pas seulement parce que j’étais en vacances).

Ceci étant, tout ce que je viens de dire n’est valable que pour les trois premiers tomes de la saga, ensuite de quoi la série explose en plein vol.

Le livre de trop

Arrive le 4ième tome, et là... je comprends pas. Vous voyez ces films de noël nuls qui passent systématiquement à la télé au mois de décembre en milieu d’après midi ? Ces films familiaux où toute la tension vient de la visite surprise de tonton bourré que les personnages n’avaient pas vu depuis 10 ans et de la mère célibataire qui se demande comment elle va pouvoir acheter des cadeaux alors qu’elle n’a plus un rond sur son compte à cause de son boulot mal payé et de ses quatre mioches à nourrir ? Hé ben le 4ième tome de la saga, c’est exactement ça.

Ce tome raconte les péripéties des personnages alors qu’ils se préparent à fêter l’équivalent de noël dans leur monde. Et c’est tout. Comment ? C’est quoi le rapport avec les trois bouquins d’avant qui parlaient d’un conflit armé avec un autre royaume et de sauver le monde ? Arrêtez de poser des questions, c’est embarrassant !

Déjà le livre marque une rupture dans la narration avec les tomes précédents car d’un seul coup on se met à suivre plusieurs personnages alors que jusqu’ici on avait toujours été avec Feyre uniquement (à part de très rares et très courtes exceptions). Dans ce tome 4, Feyre n’est plus qu’un protagoniste parmi d’autres, et ce qui est bizarre est qu’ils ne sont pas tous traités de la même façon. Si les passages concernant Feyre (ainsi qu’un autre personnage) sont toujours racontés à la première personne, les autres protagonistes n’ont pas le droit à cet honneur et sont narrés à la troisième personne. Ça pourrait être un effet de style pour faire comprendre que, même si c’est moins le cas dans ce livre, Feyre reste le personnage principal du récit, sauf que le tome 5 viendra complètement démentir cette hypothèse. Donc je ne sais pas, on a deux personnages qui sont traités de façon différente des autres sans raison apparente à part «jusqu’ici Feyre était à la première personne, alors je continue mais les autres j’ai pas envie».

Mais ça, à la limite, c’est pas bien grave ; ça fait bizarre mais on s’y fait. Non le vrai problème de ce livre, c’est qu’il n’a rien à raconter. En fait, l’histoire principale de la saga jusqu’ici s’est terminée dans le tome 3, et le tome 4 laisse entendre qu’il va nous raconter les retombées du conflit qu’on vient de suivre. Et effectivement il en parle... vite fait... dans le fond... et en fait on s’en fout parce qu’il ne se passe rien. Non, vraiment, ce bouquin c’est juste la petite vie des personnages au jour le jour pendant qu’ils font leurs courses de noël.

En le lisant je n’ai pas pu m’empêcher de penser à la trilogie des Joyaux noirs de Anne Bishop, qui fait un peu ça aussi : suivre des personnages au cours de leur vie sans qu’on sache trop vers où le récit veut nous amener. La grosse différence c’est que Anne Bishop arrive à mettre un fond intéressant à tout ça, c’est pas juste des personnages qui fêtent noël, il y a des personnages vraiment attachants ainsi qu’une trame solide derrière (c’est juste qu’on ne sait pas trop où ça nous mène). J’ai eu l’impression que l’autrice essayait de faire la même chose, sauf que la trame de fond est super mince, très courte et n’aboutit à rien du tout. Très sincèrement, vous pouvez complètement ignorer le tome 4 et passer directement au suivant, vous ne serez pas spécialement perdu tellement il n’y a rien à retirer de ce livre là. Le bouquin se place dans le même univers, utilise les mêmes personnages, mais il raconte des trucs dans son coin... des trucs dont tout le monde se fout en plus.

Mais aussi inintéressant que soit ce quatrième livre, il a au moins le bon goût d’être le plus court de la saga et passe donc assez vite. Le tome cinq n’a même pas cette politesse puisqu’il est, au contraire, le plus long de tous.

Le deuxième livre de trop

- Moi : «Hé, salut Tome 5 ! Je suis content de te voir ! Tome 4 m’a soulé avec ses conneries inintéressantes de film de noël français là... On peut revenir à l’aventure un peu ? Tu sais, les bagarres, les objets magiques, les méchants qui font des trucs de méchants, tout ça...»

- Tome 5 : «Heu... non. Enfin si, y’aura des objets magiques ! Enfin, un peu. Vite fait, quoi. Mais c’est surtout introspectif comme livre, tu vois ?»

- Moi : «C’est à dire ? Feyre a une crise existentielle ?»

- Tome 5 : «De quoi qui ça ?»

- Moi : «Ben Feyre... Tu sais, l’héroïne ?»

- Tome 5 : «Ah ! Ah ouais non, chez moi c’est un personnage tertiaire qui ne sert strictement à rien»

- Moi : «Mais... On va suivre qui alors ? Tous les autres personnages comme avec Tome 4 ?»

- Tome 5 : «Oula non ! Ça fait trop de monde ! Non rassure-toi, on va en garder un seul en principal, ça évite de trop se disperser»

- Moi : «Ah, ouf. Mais si c’est pas Feyre, ça va être qui alors ? Rhysand je suppose ? Ça semblerait logique, c’est le seul autre personnage qui a eu droit à une narration à la première personne jusque là...»

- Tome 5 : «Non non, lui non plus il ne sert plus à rien. Non, tu te rappelles de Nesta, la sœur de Feyre que tu n’aimes pas du tout parce que c’est une vraie tête à claques depuis le tout début ? Je me suis dit que ça serait super de la voir se morfondre sur son tempérament de connasse pendant 700 pages !»

- Moi : «... C’est bon j’me casse...»

- Tome 5 : «Hein ? Non mais attends, reste ! Regarde, j’ai mis du cul et des nichons ! T’aimes bien ça les nichons ! Steuplééééé !»

Oui, ce dernier tome a comme protagoniste Nesta, le personnage le plus insupportable de toute la clique des «gentils». Autant dire que je ne sautais pas de joie en abordant ce nouveau livre, surtout en sortant du tome précédent déjà extrêmement décevant. 

L’autrice nous refait encore le coup d’essayer de nous faire croire qu’il va se passer quelque chose d’intéressant en laissant miroiter un nouveau conflit en arrière plan, mais au final il ne se passera strictement rien avant les tout derniers chapitres, et le peu qu’il se passe à ce moment là ne justifie pas autant d’attente. D’autant plus qu’après avoir passé 600 pages qui ne racontent rien à part les tourments intérieurs d’une connasse qui se sent mal d’être une connasse, autant vous dire que j’en avais strictement plus rien à foutre de ce qui pouvait se passer.

Ce livre n’a rien pour lui : le personnage principal est détestable, j’avais envie de la baffer à chaque fois qu’elle se comportait comme une pétasse ou se morfondait sur elle-même (ce qui arrive globalement 2 ou 3 fois par chapitre sur la première moitié du bouquin), les personnages de Feyre et Rhysand passent du statut de protagonistes appréciables à figurants inutiles et la véritable histoire intéressante ne raconte finalement rien en plus de le faire depuis le fond de la salle où on ne l’entend presque pas.

Pour vous donner une idée d’à quel point ce bouquin est vide malgré ses 700 et quelques pages, je vais vous le résumer intégralement en une seule phrase : Nesta est une connasse, elle le sait, et elle va s’entraîner avec Cassian pour devenir une guerrière et arrêter d’être une connasse. Voila, navré pour le spoil mais je viens de vous épargner 700 pages de lecture, car il n’y a vraiment rien de plus que ça.

Ah, si, pardon, j’ai oublié un truc : ils baisent. S’il y avait bien un peu de sexe dans les tomes précédents, c’était relativement discret et survolé. Ici, les scènes de sexe deviennent plus nombreuses et beaucoup plus détaillées au point que, chose que je n’avais pas remarqué en achetant le livre, la quatrième de couverture indique «À partir de 18 ans. Ce roman comporte des scènes de sexe explicites» (c’est la première fois que je vois ça sur un bouquin). Et effectivement, la partie centrale du récit ressemble plus à une fan fiction érotique avec beaucoup de blabla inintéressant entre les scènes de cul qu’à autre chose.

Je ne vois pas bien quoi vous dire de plus sur ce bouquin étant donné que je vous l’ai déjà intégralement résumé. C’est long, chiant, et n’a encore une fois rien à voir avec les trois premiers tomes de la saga.

Conclusion

La saga d’Acotar (sérieusement, pourquoi ce nom ?) est une sagas plutôt sympathique à condition de s’en tenir aux trois premiers tomes qui vous offrirons un récit complet et agréable, même s’il utilise des artifices scénaristiques pas toujours très subtils. Les tomes 4 et 5, en revanche, me laissent penser que l’autrice n’avait prévu que trois tomes à la base et a voulu en faire deux de plus pour profiter du succès de sa saga, mais ne savait absolument pas quoi raconter pour continuer son récit. Le tome 4 ne raconte absolument rien d’intéressant, le tome 5 ne raconte rien d’intéressant non plus mais pendant beaucoup plus longtemps et avec une héroïne qu’on a pas envie de suivre (et du cul pour essayer de faire passer la pilule). Vous l’aurez compris, si je peux sans problème vous recommander les trois premiers livres si voulez une saga de fantaisie grand public, je vous invite à faire l’impasse sur les deux derniers qui vous feront juste perdre votre temps.

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